Qu’est-ce que la culture du consensus en Suisse ?

La Suisse est gouvernée par le Conseil fédéral. Il se compose de 7 membres qui prend ses décisions par consensus.

Les conseillères et conseillers fédéraux se mettent en effet d’accord entre eux sur les décisions qui engagent les destinées du pays.

Cette forme de gouvernement est appelée « démocratie de concordance ». En vertu de ce principe, les partis politiques de tous bords sont appelés à collaborer au sein du gouvernement.

Cette manière de gouverner a de quoi surprendre si on la compare à d’autres pays européens comme la France, le Royaume-Uni ou l’Italie …

En effet, si un début de culture du consensus peut se matérialiser dans ces pays au niveau local, le consensus est loin d’être la règle à l’échelon national.

Il suffit pour s’en convaincre de regarder les joutes oratoires auxquelles se livrent les députés de ces pays dans leurs assemblées respectives.

Quelles sont donc les raisons propres à la Suisse qui permettent cette culture du consensus ?

Est-ce que cela freine la prise de décisions par les organes politiques au quotidien ? Les débats sont-ils houleux ?

La culture du consensus empêche-t-elle à une opposition de s’exprimer ?

PoliticAll, votre réseau social 100 % politique vous dit tout de cette culture du consensus qui est un principe central de la vie politique suisse.

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Suisse : le consensus comme manière de gouverner

Le gouvernement fonctionne selon ce principe absolu.

Ses décisions sont présentées comme étant le résultat et l’expression d’un consensus et sont assumées collégialement au sein du Conseil fédéral, le gouvernement suisse.

Dans cette démocratie de concordance, l’organe exécutif fédéral, le Conseil fédéral composé de 7 membres occupe une place centrale.

Les partis politiques qui rallient le plus grand nombre de suffrages se partagent les sièges de l’exécutif formant dès lors un gouvernement rassemblant toutes les grandes formations politiques. Le principe de collégialité est le corollaire de cette culture du consensus : le gouvernement fait front uni pour défendre les décisions que les membres ont pris ensemble.

L’idée de la concordance est centrale au Conseil fédéral mais également dans les autres organes politiques. Tous les partis importants sont systématiquement impliqués dans le processus décisionnel, basé sur le consensus.

L’égalité entre les membres du gouvernement, l’élection au Conseil national au scrutin proportionnel, le fédéralisme qui attribue de larges compétences aux cantons et la diversité du tissu linguistique, régional et économique sont autant de facteurs propices à la culture du consensus en Suisse.

Les majorités ne sont ainsi pas seules à présider aux destinées du pays, les minorités ont elles aussi leur mot à dire et participent à l’élaboration de solutions négociées.

Chacune et chacun est invité à participer aux débats, des débats qui peuvent toutefois s’avérer houleux. Le chemin qui mène à la concordance est assez souvent parsemé d’embûches !

Les décisions politiques en Suisse demandent en effet un long travail de maturation, fait de discussions, d’auditions, de consultations, de débats parlementaires et même de votations populaires (l’initiative populaire et le référendum) qui sont l’expression de la démocratie directe.

Bien que ce parcours, ce chemin vers le consensus soit long, il n’est pas source de blocage pour autant ! Au contraire, ces processus débouchent toujours ou presque sur des résultats étonnants.

Nous verrons ainsi dans la deuxième partie de cet article que la démocratie de concordance permet de résoudre les crises et les problèmes de manière raisonnable.

Le Savez-vous ?  

Bien que pas explicitement mentionnée dans la Constitution, la démocratie de concordance s’est développée en Suisse à partir des années 1930. La collaboration entre les partis se renforce par la suite culminant en 1943 avec l’élection d’Ernst Nobs, premier social-démocrate à entrer au Conseil fédéral.

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Un processus politique pragmatique capable de résoudre les problèmes de manière satisfaisante et raisonnable

La démocratie de concordance est le contraire de la démocratie dite de « concurrence ». Cette dernière est présente dans la plupart des autres démocraties du monde.

Dans ce cadre, après les élections, le parti ayant obtenu le plus de voix prend le pouvoir et forme un gouvernement. Aux élections suivantes, les rapports de force évoluent avec éventuellement une nouvelle majorité et un nouveau gouvernement.

Ce nouveau gouvernement aura alors très souvent qu’une seule idée en tête, défaire ce qui a été réalisé par l’équipe gouvernementale précédente.

Et cela est la règle à chaque alternance ou changement de majorité parlementaire. Cette instabilité ne permet pas en toute logique de gérer le pays dans la durée.

Au contraire de la concordance qui en recherchant un équilibre favorise un processus politique serein et pragmatique permettant de résoudre les problèmes et les crises qui se posent de manière satisfaisante et raisonnable.

La démocratie de concordance assure à la Suisse stabilité et continuité dans sa prise de décisions.

En effet, en Suisse, aucune majorité ne va chercher à démonter ce qu’à pu faire l’opposition durant le mandat précédent. L’opposition en Suisse est avant tout une opposition constructive.

N'oublions pas enfin que la principale force d’opposition en Suisse demeure le peuple qui peut à tout moment s’impliquer dans le processus politique grâce aux outils de la démocratie directe que sont le référendum et l’initiative populaire.

Conclusion : 

Nous avons montré que le consensus était une manière de gouverner propre à la Suisse qui lui assure une stabilité et une durabilité dans la gestion du pays.

Mais au cours des vingt dernières années, le concept s’est affaibli et la polarisation a gagné du terrain.

Comme en témoigne l’initiative du 28 février 2016 sur la mise en œuvre de l’expulsion des criminels étrangers rejetée par 58,9 % des électeurs suisses et précédée d’une campagne très polémique.

L’initiative rejetée le 28 février est un bon exemple de l’absence de consensus avec des opinions très polarisées. L’émotionnel a donc le pris le pas sur la raison au cours des débats.

Ainsi l’émotionnel et les débats passionnés qui en découlent peuvent-ils triompher de la culture du consensus ?

Débat : Que pensez-vous de la culture du consensus qui est à l'oeuvre en Suisse ? Pensez-vous qu'elle puisse s'appliquer dans d'autres pays comme la France ? 

LANCER LE DÉBAT