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Qu’est-ce que la démocratie directe en Suisse ?

Rédigé par PoliticAll | 2 déc. 2022 11:04:07

Dans l’antiquité, la démocratie désignait une assemblée au sein de laquelle les citoyens pouvaient discuter et prendre des décisions sur des questions d’intérêt public.

Dans l’époque moderne et dans de nombreux pays, la démocratie est indirecte ou représentative, elle consiste pour les citoyens à élire des représentants.

Or, cette forme de démocratie est aujourd’hui en crise !

L’augmentation de l’abstention à chaque scrutin qu’il soit local ou national est là pour en témoigner. Pour lui redonner un nouveau souffle, de nombreux pays ont intégré des éléments de démocratie directe et participative dans leurs systèmes politiques. C’est en Suisse que le caractère participatif de la démocratie s’est le plus développé avec l’utilisation d’outils comme l’initiative populaire et le référendum.

Quelles sont les caractéristiques de ces instruments de démocratie directe en Suisse ? Quelles sont les étapes à suivre pour les mettre en place ? Quelles sont les règles ou procédures à respecter ?

PoliticAll, votre réseau social 100 % politique vous dit tout ce qu’il faut savoir au sujet des principales caractéristiques de la démocratie directe en Suisse.

L'initiative populaire et le référendum populaire : deux instruments clés de la démocratie moderne en Suisse  

L’initiative populaire et le référendum populaire sont les deux instruments clés de la démocratie directe moderne en Suisse. Depuis leur adoption respectivement en 1874 (pour le référendum) et en 1891 (pour initiative populaire), ils ont souvent été utilisés pour promouvoir des idées et contrôler le parlement élu.

Ce sont des outils importants en Suisse pour l’exercice de la souveraineté populaire au-delà du jour du scrutin et garantissent la continuité du débat au jour le jour entre le peuple et ses représentants élus.

L’initiative populaire : Elle permet aux citoyens de faire entendre leur voix dans le dialogue avec les institutions politiques.

 

Quelles sont les étapes à suivre pour la mettre en place ?

1) Imaginez que vous vouliez voir aboutir votre idée en proposition d’amendement à la constitution

2) Vous devez alors mettre sur pied un comité d’initiative composé au moins de vous-même et de six autres personnes

3) Pour pouvoir enregistrer votre initiative auprès de la chancellerie fédérale (état-major du gouvernement), le comité d’initiative doit prendre contact avec cette dernière pour obtenir les informations détaillées concernant la procédure à suivre.

4) L’article que vous proposez doit être enregistré dans les trois langues officielles puis publié dans la Feuille fédérale (qui comprend l’ensemble des messages et rapports du Conseil fédéral et de l’Assemblée fédérale, les arrêtés fédéraux et lois fédérales…), vous pouvez ensuite lancer la collecte de signatures.

5) Vous disposez maintenant de 18 mois pour trouver au moins 100 000 personnes qui adhèrent à votre idée. Ce processus exige un important travail de relations publiques et de l’argent.

6) En tant que membre du comité d’initiative, vous êtes responsable de l’envoi des listes de signatures aux communes concernées pour vérification de leur validité dans le registre des électeurs. Vous devez ensuite remettre personnellement à la chancellerie fédérale les cartons contenant les listes, moment à partir duquel votre initiative devient officiellement un enjeu fédéral.

C’est maintenant au gouvernement de répondre dans un délai de 18 mois.

Dans la plupart des cas, le Conseil fédéral (le gouvernement) n’adhère pas complètement au texte de l’initiative et propose alors un contre-projet à l’initiative. Le comité d’initiative a la possibilité de retirer son texte jusqu’à ce que le gouvernement ait fixé la date de la votation. Les prises de position du gouvernement et des deux chambres du Parlement n’ont qu’une valeur de recommandation et en général ces trois instances se mettent d’accord pour adopter une position commune. Mais dans tous les cas, le dernier mot appartient au peuple souverain !

L’initiative populaire est ainsi un processus qui s’inscrit sur plusieurs années et demande de la patience, des moyens financiers et beaucoup de temps.

Le jour de la décision : Le gouvernement fixe la date à laquelle les électeurs seront appelés à se prononcer sur votre initiative. Entre trois et six semaines avant, tous les citoyens suisses (y compris ceux de l’étranger) reçoivent le matériel de vote à leur domicile et la plupart votent par correspondance, voire, dans certains cantons désormais en ligne. Il faut la majorité du peuple et des cantons pour que votre initiative soit acceptée.

Le Savez-vous ?  

La Suisse moderne a été inventée par référendum dans le sens où en 1848 après une brève guerre civile entre cantons protestants (victorieux) et cantons catholiques se tient un référendum populaire sur la nouvelle constitution fédérale qui obtient l’approbation de la majorité du peuple et des cantons. La constitution fédérale de 1848 ancra le principe selon lequel les lois fondamentales du pays et de ses parties constituantes (cantons et communes) ne pouvaient être modifiées qu’avec l’accord du peuple.

Le référendum facultatif (si demandé par au moins 50 000 citoyens dans les 100 jours à compter de la publication officielle d’une nouvelle loi) :

Le référendum est un « instrument réactif » permettant aux personnes et aux organisations d’entamer un dialogue avec les partis politiques et les élus durant les étapes préparatoires de l’élaboration d’une loi.

La procédure :

  • Le texte du référendum doit se référer à la loi que vous voulez soumettre au vote populaire national. Vous devez aussi veiller à ce que les listes de signatures soient disponibles dans au moins trois langues (Français, Allemand et Italien).
  • Vous avez 100 jours pour récolter 50 000 signatures, le temps est compté, vous devez ainsi définir clairement où et de quelle manière vous allez toucher la population.
  • Si vous avez obtenu les 50 000 signatures dans le délai de 100 jours, la loi que vous contestez n’entrera pas en vigueur. Pour être accepté, un référendum doit obtenir la majorité simple, c’est-à-dire la majorité du peuple. La majorité des cantons n’est pas nécessaire !

Le Savez-vous ? 

En 1848, les citoyens suisses n’avaient toujours pas le droit de soumettre un objet au vote par référendum. En 1869, le canton de Zurich, déjà réputé pour être le centre de la finance et des affaires a été pionnier en introduisant l’initiative populaire comme outil de la démocratie directe moderne.

Une fréquence de votes importante mais une participation relativement faible en Suisse  

Nous avons vu dans la première partie de l’article, les deux instruments clés de la démocratie directe moderne en Suisse.

Pour autant, les Suisses sont-ils amenés à aller plus souvent aux urnes ? Ces instruments de démocratie directe permettent-ils vraiment d’améliorer les taux de participation aux scrutins ?

Nous tâcherons de répondre à ces questions dans cette seconde partie.

Le peuple suisse est appelé aux urnes quatre fois par an en moyenne.

En plus des objets nationaux, les citoyens suisses peuvent aussi se prononcer à l’échelon local. Fort logiquement, vous aurez plus l’occasion de vous exprimer dans les urnes si vous vivez dans un canton ou une ville à forte population.

Les objets des initiatives populaires et autres référendums portent le plus souvent sur le système gouvernemental, les transports, la sécurité sociale, l’environnement et la santé.

Précisons que la plupart des initiatives populaires n’atteignent pas la double majorité (peuple et cantons) tandis que la moitié environ des référendums populaires sont acceptés.

S’agissant du taux de participation, la Suisse se place souvent tout en bas du classement en matière de participation politique.

Comme aux Etats-Unis, le taux de participation est de 50 % pour les élections fédérales. Mais selon des recherches de l’université de Genève, 90 % de l’électorat participent au moins une fois par période de quatre ans, près de 80 % se prononcent au moins une fois par an et un tiers vote à chaque scrutin, qu’il soit local, régional ou national.

Conclusion : 

L’initiative populaire et le référendum populaire sont donc deux instruments clés de la démocratie directe moderne en Suisse.

Bien que les procédures et les étapes à suivre soient longues, les citoyens qui s’engagent sont satisfaits de pouvoir proposer leur texte en votation et ainsi de prendre part directement à la démocratie en débattant avec d’autres citoyens de leurs idées.

Si le taux de participation aux élections en Suisse n’est pas le meilleur au monde, il faut reconnaître aussi que les Suisses sont amenés à se prononcer davantage qu’un Français par exemple !

Ainsi, de tels instruments spécifiques à la Suisse peuvent-ils être dupliqués par d’autres pays confrontés à une démocratie représentative en perte de vitesse ?

Débat : Pensez-vous que de tels instruments de démocratie directe peuvent s'appliquer en France ?