229 ans après la décapitation de Louis XVI, l’émotion suscitée en France par la disparition de la reine Elisabeth II témoigne de l’attachement des Français pour la monarchie. Avec la disparition de la reine Elisabeth II, la France semble endeuillée autant que le Royaume-Uni alors que le 21 janvier 1793, le peuple français décapitait le roi Louis XVI sous les hourras. « Sa mort laisse en nous un sentiment de vide », a même affirmé le président de la République, Emmanuel Macron au sujet du décès d’Elisabeth II.
Tout le paradoxe français est là.
La France, c’est un peuple de républicains fascinés par les têtes couronnées. « Les Français ont le goût du prince mais ils vont le chercher à l’étranger », disait le général de Gaulle. Un intérêt pour la chose monarchique qui s’illustre notamment par les succès d’audience à la télévision. Couronnement, mariage, à chaque fois, ce sont des millions de Français qui regardent !
L’éditorialiste politique de France Inter, Yaël Goosz y voit l’expression d’un peuple qui regrette d’avoir décapité le roi. Pour tenter de combler ce manque laissé par l’absence d’un roi, la France s’est dotée d’une Vème République avec à sa tête un monarque républicain. Ainsi tous les 5 ou 10 ans, la population française est en quête de l’homme providentiel à l’occasion des élections présidentielles. La France a toujours eu cette passion. Il y a eu Clémenceau, De Gaulle, Mendès-France …
La France n’est-elle finalement pas orpheline depuis la disparition du roi ? La restauration monarchique avec à sa tête un arbitre naturel que serait le roi n’est-elle pas la voie à suivre pour répondre à la crise démocratique que connaît le pays actuellement ? Le principe de continuité monarchique et avec lui la possibilité de mener des actions sur le temps long ne pourrait-il pas s’avérer particulièrement utile alors que de grands défis s’annoncent pour l’hexagone avec les multiples conséquences du réchauffement climatique ?
Nous verrons dans cet article que la France ne s’est jamais remise de la mort de son roi le 21 janvier 1793 et que cette figure du roi pourrait être d’autant plus précieuse pour répondre aux problématiques de notre temps.
« Dans la politique française, cet absent est la figure du roi dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort. La terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n’est plus là », ses propos ont été tenus par Emmanuel Macron en 2015, alors ministre de l’économie. Emmanuel Macron soulignait alors le vidé laissé dans notre espace démocratique par la mort de Louis XVI.
Et cette impression de vide s’accroît de plus en plus tant le président de la République, « notre monarque républicain » est rentré dans le jeu politique depuis le quinquennat en 2000 devenant une sorte de « Super Premier-ministre ».
Il ne parvient plus comme hier De Gaulle et Mitterrand à prendre de la hauteur pour apparaître aux yeux des Français comme l’arbitre de la nation. Sans oublier que sa légitimité compte tenu de la hausse de l’abstention est remise en cause. Conséquence, l’unité de l’Etat est mise à mal, le pays divisé !
Or avec un roi au-dessus de la mêlée, la France se doterait d’une figure qui ne serait en aucune manière soumise à des pressions politiques. En effet, le roi n’est ni de droite, ni de gauche, ni du centre ! Désormais les partisans de la monarchie n’ont plus peur de prendre la parole.
Si pour certains la restauration de la monarchie est une idée qui appartient au passé, 17 % des Français selon une enquête de l’institut BVA en 2016 seraient malgré tout favorables à ce que la fonction de Chef de l’Etat en France soit assumée par un roi.
Un intérêt identique pour la monarchie à celui qui avait été mesuré en 2007. Et même 29 % des Français pourraient voter pour un candidat royaliste au premier tour de l’élection présidentielle… mais seuls 5 % le feraient certainement.
Toujours dans le même sondage, 40 % des sondés pensent qu’un retour de la monarchie aurait des conséquences plutôt positives pour l’unité nationale et 37 % pour la stabilité du gouvernement.
Débat : Et vous, êtes-vous favorable au retour d'un roi en France ?
La monarchie apparaît comme une alternative crédible à une Vème République qui apparaît de plus en plus épuisée. Il va de soit que le retour de la monarchie ne s’accompagnerait en aucune manière du retour des privilèges !
Il s’agirait bien d’une monarchie constitutionnelle où les pouvoirs du roi qui est le chef de l’Etat sont limités par la constitution. Il peut même s’agir de la constitution de la Vème République, un régime dans lequel le Président de la République peut facilement le cas échéant être remplacé par un monarque.
Cela pourrait même rééquilibrer la constitution de 1958 telle qu’elle avait été conçue en 1958 par le Général de Gaulle et Michel Debré avec un rôle bien défini pour les deux têtes de l’exécutif à savoir le Chef de l’Etat et son premier ministre. Pour le reste, les institutions resteraient inchangées : Assemblée nationale et Sénat.
Le roi règne !
La ou le Premier ministre gouverne et est responsable devant l’Assemblée nationale ! Le roi ne serait toutefois pas là que pour inaugurer les chrysanthèmes, il incarnerait quant à lui l’Etat et l’unité de la nation. ll ferait office d’arbitre en cas de désordre dans le pays ou de désaccord politique. Dans des cas d’instabilité politique, il pourrait même user de son droit de dissolution de l’Assemblée nationale et même de son droit de véto pour refuser de promulguer une loi qu’il jugerait aller à l’encontre des intérêts supérieurs de la nation.
Le roi serait en charge des orientations stratégiques et de représenter la France à l’étranger. Il exprimerait chaque année durant un « discours du trône » devant les Assemblées réunis en congrès sa « vision » avec quelques priorités pour l’année, charge ensuite à la ou au Premier ministre de les mettre en place et de gérer les affaires du quotidien.
Le roi ne se substituerait pas au Premier ministre, au gouvernement et à un Parlement qui pourraient être élus démocratiquement et qui représenteraient une autre légitimité. S’agissant du coût de la restauration de la monarchie. Si nous transposons le budget de la couronne britannique sur celui de la France, la monarchie ne représenterait que 70 centimes d’euros par ménage français.
Enfin, qui pour devenir roi ? Quelle dynastie pour accéder au trône de France ?
Il serait possible de créer une dynastie ex-nihilo, c’est-à-dire une dynastie n’ayant jamais gouverné la France mais le plus vraisemblable c’est que le trône de France se jouerait entre trois prétendants.Trois prétendants représentants des familles qui ont déjà gouverné la France.
Une guerre pour le trône qui dure depuis 1883. La faute au comte de Chambord, petit-fils de Charles X (roi de 1825 à 1830), le fameux Henri V qui a refusé une couronne offerte par l’Assemblée nationale (1870-1873) par simple refus du drapeau tricolore.
Sachez que de 1870 à 1875, la troisième République est créée par des monarchistes qui sont majoritaires à l’Assemblée constituante et qui décident de créer un système qui le jour venu pourra redevenir une monarchie parlementaire du type Louis-Philippe.
Dans tous les cas, une guerre pour le trône se déclencherait entre pro-Bourbon et pro-orléanistes car ils se détestent depuis que l’un a voté la mort de l’autre (d’après la légende, Philippe Egalité, un Orléans est la voix qui a donné la majorité pour la mort de Louis XVI). Le trône de France pourrait donc se jouer entre le comte de Paris, le prince Jean IV d’Orléans descendant de Louis-Philippe 1er, dernier roi des Français (1830-1848), un Bourbon, Louis de Bourbon, descendant de Philippe V d’Espagne et enfin le prince Jean-Christophe Napoléon, descendant du prince Jérôme, le frère de Napoléon 1er.
Avantage au comte de Paris dont le grand-père a failli succéder au général de Gaulle lorsque celui-ci a songé à restaurer la monarchie entre 1960 et 1965. Il reste en plus soutenu par la quasi majorité des mouvements royalistes. Le Général de Gaulle rencontre en effet à l’Elysée le comte de Paris et lui donne trois ans pour se préparer affirmant qu’il n’entend pas se représenter au terme de son mandat en 1965.
La voie vers la restauration monarchie semble alors toute tracée, finalement De Gaulle décida de se représenter. Probablement que le Général utilisa le comte de Paris pour faire pression auprès des Gaullistes pour qu’ils le soutiennent pour un nouveau mandat.
La légitimité du président de la République est remise en cause, vive le Roi !
L’émoi des Français suite au décès d’Elisabeth II souligne leur attachement aux têtes couronnées. C’est comme si tout un peuple regrettait d’avoir décapité son roi Louis XVI, le 21 janvier 1793. Pour combler ce vide laissé par l’absence d’un roi, la France s’est dotée d’une Vème République avec à sa tête un monarque républicain, le président de la République.
Mais le quinquennat a transformé le rôle du président de la République qui n’est aujourd’hui qu’une sorte de « super premier-ministre ». Entre un régime de la Vème République critiqué, une légitimité remise en cause, le président de la République ne parvient plus à endosser son costume d’arbitre naturel.
La monarchie et avec elle le retour d’un Roi comme Chef de l’Etat dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle apparaît ainsi comme une alternative crédible à une Vème République qui apparaît de plus en plus épuisée.
Le roi ne serait toutefois pas là que pour inaugurer les chrysanthèmes, il incarnerait l’Etat et l’unité de la nation. Le principe de continuité monarchique et avec lui une certaine logique du temps long pourrait s’avérer particulièrement utile alors que de grands défis s’annoncent pour notre pays à commencer par les conséquences du réchauffement climatique.