Tous les commentateurs et les chefs de partis sont encore médusés par cette annonce sur les plateaux des chaînes de télévision. Quelques minutes plus tôt à 20 h, c’est son visage qui est apparu sur les écrans de millions de Françaises et de Français.
Mais ce n’est pas une surprise pour autant ! Cela vient confirmer les sondages des derniers jours ! C’est donc elle !
C’est Jordan Bardella, Président de son mouvement, le Rassemblement national (RN) qui lui a annoncé les résultats de ce second tour des élections présidentielles de 2027. Marine Le Pen avec ses 51 % sort victorieuse de ce scrutin à sa quatrième tentative ! Elle devient la première femme élue Présidente de la République.
Bien sûr, pour l’heure, il ne s’agit que d’une fiction !
Mais cela pourrait devenir un jour réalité tant la droite radicale connaît en Europe une irrésistible ascension ces dernières semaines. En Italie, la cheffe de file du parti national-conservateur Fratelli d’Italia, Giorgia Meloni a remporté le 26 septembre dernier les législatives haut la main avec 26 % des voix.
Après la Suède, l’Italie devient en moins de deux semaines le second pays européen à porter au pouvoir une coalition de droite au sein de laquelle les droites radicales sont arrivées en tête. La victoire de Giorgia Meloni dans un pays qui est aussi la troisième économie de l’Union européenne donne des ailes aux ultra-conservateurs jusque dans l’hexagone.
L’optimisme est en effet de mise au Rassemblement national (RN) depuis son score historique aux législatives de juin. La formation nationaliste a ainsi obtenu 89 sièges à l’Assemblée nationale et a pu constituer un groupe parlementaire pour devenir ainsi le premier groupe d’opposition dans l’hémicycle. La France ne fait ainsi pas exception à cette montée de la droite radicale, il paraît de plus en plus légitime de s’interroger sur les chances du Rassemblement national (RN) de remporter la prochaine élection présidentielle en 2027.
L'irrésistible ascension de la droite radicale européenne de la Suède à l'Italie
Partout en Europe, la droite radicale gagne du terrain.
Des partis nationalistes sont arrivés au pouvoir en Europe de l’Est, en Hongrie et Pologne notamment. Ils ont intégré des coalitions en Finlande ou en Norvège. Dans tous ces pays, la droite radicale fait campagne sur le sentiment de déclassement et d’insécurité économique des Européens.
Le tout amplifié désormais par la crise énergétique ! Et cela fonctionne comme le montre les récents scrutins en Suède et en Italie. Intéressons-nous d’abord à la Suède !
Fief de la social-démocratie, la Suède a vu le parti, des Démocrates de Suède fondé par des nationalistes à la fin des années 80 réaliser 20 % des voix, derrière les sociaux-démocrates. Il a permis à la coalition de droite dont il fait partie de battre sur le fil le bloc de gauche (sociaux-démocrates, écologistes et gauche radicale).
Le parti a ainsi pris la tête du bloc de droite et mis fin à huit ans de gouvernance social-démocrate. Les Démocrates de Suède ont profité d’une campagne largement dominée par les thèmes de l’insécurité et de l’immigration.
La montée de la droite radicale a fini par submerger la digue qui la dissociait de la droite classique. Cette dernière en déclin qui pour s’assurer une place au pouvoir est prête à envisager désormais une coopération plus ou moins approfondie avec la droite radicale.
Quant à l’Italie, la cheffe de file du parti national-conservateur Fratelli d’Italia, Giorgia Meloni a remporté haut la main les législatives avec plus de 26 % des voix. Meloni est la figure de proue d’une coalition emmenée par le parti de la droite radicale qu’elle dirige depuis huit ans et qui rassemble la ligue de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi.
Les deux mouvements de la droite radicale en Suède et en Italie ont plusieurs choses en commun. Ils sont conservateurs en terme sociétal et libéraux sur le plan économique, ils sont tous les deux anti-immigration, anti-islam, anti-avortement et anti-LGBT.
Ils se font tous les deux les porte-paroles d’une nostalgie d’un pays dominant confronté au déclin. Ils aiment se présenter comme des outsiders qui n’ont jamais exercé le pouvoir, ce qui est vrai d’ailleurs !
Les Démocrates de Suède n’ont jamais intégré l’une des coalitions gouvernementales et en Italie, le parti de Giorgia Meloni n’a pas rejoint le gouvernement d’alliance nationale de Mario Draghi. Et Fratelli d’Italia était même restée à l’écart de la précédente coalition populiste autour de Matteo Salvini.
La montée en puissance de la droite radicale risque de se confirmer dans les urnes à l’occasion des scrutins en Slovénie, République Tchèque, Finlande ou Danemark. Et qu’en est-il en France ?
Après le résultat inespéré aux législatives pour son parti, Marine Le Pen peut-elle réellement être optimiste pour 2027 compte tenu de ce nouveau paysage politique européen ?
Précisons toutefois qu’en Suède ou en Italie, la politique se fait par alliances. C’est différent en France ! Marine Le Pen n’a jamais en effet donné suite aux propositions d’union des droites de Marion Maréchal ou d’Eric Zemmour de Reconquête.
Le mode de scrutin est également différent. En Italie, la proportionnelle est de mise ainsi avec 25 % des voix, il est possible de se retrouver à la tête d’un pays, en France, il faut obtenir 50 % plus une voix.
Accéder au pouvoir est ainsi plus compliqué pour le RN en France !
Réaliser "l'union des Droites", une condition indispensable pour le RN pour accéder au pouvoir ?
La France ne fait pas exception à cette montée de la droite radicale avec un record historique de sièges à l’Assemblée nationale pour le RN en avril avec ses 89 députés.
Rappelons qu’aux législatives de 2017, le Rassemblement national (RN) avait obtenu seulement 8 % des voix et 8 députés au Palais Bourbon.
Le Rassemblement national est le parti qui monte ces dernières années entre la présence de Marine Le Pen au second tour des Présidentielles en 2017 et en 2022 sans oublier que le parti est également arrivé en tête des élections européennes de 2019 en France avec 23,31% des voix ce qui lui a permis d’envoyer 22 députés au Parlement européen.
Le Rassemblement national a également profité que ses thématiques de prédilection immigration et insécurité triomphent sur tous les plateaux de télévision à commencer par les chaînes d’infos en continue et fassent les gros titres des journaux et des magazines.
Il reste encore au Rassemblement national et à Marine Le Pen à détruire le « plafond de verre » pour prétendre obtenir la majorité à l’Assemblée ou gagner la Présidentielle. Un plafond de verre qui s’explique par la digue sanitaire qui sépare droite traditionnelle (LR) et droite radicale (RN).
Cette digue semble toutefois être en train de céder.
La droite traditionnelle en déclin ne semble plus parvenir à endiguer les différentes vagues RN aux élections. Les LR semblent condamner à s’allier au RN pour remporter une élection majeure. S’il n’est toujours pas question de s’allier avec la droite radicale, les Républicains se montrent plus indulgents envers Marine Le Pen. Ils ne la rallient pas, pas encore, mais ils ne la combattent plus.
Maintenir un cordon sanitaire avec la droite radicale est-il toujours d’actualité pour une droite française qui a perdu le pouvoir depuis 2012 ? Le retour au pouvoir pour la droite française est-il possible sans alliance avec le RN ?
Un débat réactivé par le candidat Reconquête, Eric Zemmour qui durant la dernière présidentielle a appelé de ses vœux à « l’union des Droites ». Un parti Reconquête qui avait d’ailleurs obtenu le ralliement de plusieurs élus LR durant la campagne.
Combien de temps encore la digue qui sépare droite traditionnelle et RN va-t-elle pouvoir subsister ?
La droite classique compte tenu de son dernier score à la présidentielle moins de 5 % est contrainte pour exister électoralement de se rapprocher de partis de la droite radicale RN ou Reconquête, des partis qu’elle jugeait autrefois comme infréquentable. Aujourd’hui, la donne a changé et le rapport de force à Droite est en faveur de de la droite radicale.
En effet, Marine Le Pen a obtenu cinq fois plus de voix que Valérie Pécresse, candidate LR à la présidentielle. Mais surtout le RN est devenu le premier groupe d’opposition au Palais-Bourbon avec 89 députés contre seulement 62 sièges sauvés par LR.
Nous assistons alors au dernier stade de la normalisation de ce mouvement : sa professionnalisation et la formation de ses cadres. Du côté des LR, ils doivent se trouver un nouveau chef, le premier tour de son élection interne se tiendra les 3 et 4 décembre prochain.
Favori pour la présidence du parti, le député Eric Ciotti particulièrement ferme sur les questions de sécurité et d’immigration n’a jamais caché sa proximité idéologique avec le polémiste Eric Zemmour, sans aller toutefois jusqu’à appeler à un rapprochement.
En sera-t-il de même au lendemain d’une victoire de Ciotti le 4 décembre ?
Précisons qu’Eric Ciotti fait déjà campagne pour une candidature du président de la Région Rhônes-Alpes, Laurent Wauquiez pour 2027 lui aussi partisan d’une droite dure. Pour autant, « l’union des droites » va-t-elle devenir réalité ? Pour l’heure, elle ne reçoit que les faveurs d’Eric Zemmour.
Marine Le Pen la rejette de son côté.
Peut-être que la victoire de « l’union des droites » en Italie va-t-elle la faire changer d’avis ? La victoire de Giorgia Meloni a d’ailleurs été saluée par Eric Zemmour et Marine Le Pen.
Le chef de file de Reconquête d’affirmer : « Toutes mes félicitations à Giorgia Meloni et au peuple italien ! Comment ne pas regarder cette victoire comme la preuve qu’unis, arriver au pouvoir est possible ». De son côté, Marion Maréchal aujourd’hui à Reconquête et nièce de Marine Le Pen a plaidé une nouvelle fois pour une coalition à droite en France comme celle qui s’est imposée en Italie mais aussi en Suède.
Des victoires à l’échelle de l’Europe qui peuvent donner des ailes à la droite radicale française pour 2027.
